COUDREAU, Henri. Voyage au Tocantins - Araguaya: 31 décembre 1896 - 23 mai 1897. Paris: A. Lahure, 1897. 298 p.

VOYAGE AU TOCANTINS-ARAGUAYA. 55 s01r. Nous al'rêtons de meilleure heure pour ~voir le temps de hien cc armer » les te.ntes de campagraes. Au moins pas~era-t-on la n.uit au sec, ou à peu pres. 5. - C'est une surprise, comme je me réveille à 5 heures, de contempler un beau ciel clair. Aussi bien a-t-on généralement dans la région Amazonienne un cc petit é té >> en févt·ier ou mars : je compte bien que, celte année, (( l'été de mars " ne va pas noms faire défaut. La riviere croit toujours. L'eau a monté, cette nuit, de plus de r/2 metre : des pluies abondan tes ont dü tomber dans des forêts d 'amont. La journée commence au beau, toutefois cela a bién nn pen l'afr d'un men– songe : Ies pâleurs rosées du levant peuvent annoncer tout aussi bien la pluie que le solei!. Nous allons ma~ntenant perdus dans des saranzaes, parmi de petites iles · basses en désordre qui encombrent tellement le lit de la riviere que, pour prendre mes directi<~>ns, j,e suis obligé de me repérer sur le sommet de que1que .colline riveraine entrevue à travers le fouilJis _de végéta tions basses. · Ce voyage a aussi ses travailleurs aérien3 : il y a le plus souvent un homm~ monté sur la tolde, c'est là son poste de combat. il tire avec le gancho, il tire avec les mains, pendant que les autres so_n L aux forquilhas, aux pagaye~, aux ganchos, et que le cc pro,eiro ?>, lui le proeiro par excellence, l'homme d 'avant, est au gancho-boi, au boi comme on dit parfois pour simpl'ifier. Tout est silence. Ces ~olitudes paraissent être, par moments, Ie triomphe exclusif du regne végétal : on passe parfoís toute une ma_tinée sans entendre un chant d'oiseaux. Nous allons passant les rapides, doublant les points; poursuivant, devant d'aulres horizons : Je silence no_us précede, le silence nous accompagne, le silence nous suit. , A l'issue d ' un bout de canal libre, une vue SUL' un marais. Dans ce marais ' assez loin, érigeant sa masse puissante, un grand castanheiro isolé. De temps à autre, doúblant quelque pointe ou con:toumant quelque saranzae, un des forquilheiros, manquant son coup, tombe -à l'eau la tête la premiere. On arrête et bientôt notre jeune homme remonte à bord, ruisselant, tenant aux dents son petit chapeau de feutre noir qu'il a arraché au courant qui l'emportait. Le cc barqueiro » se secoue et reprend en riant son instrument de . . \ ' travai!.

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